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Des victimes de racisme demandent à l'Assemblée nationale du Québec et aux Nations Unies d'examiner les délais excessifs dans le traitement de leurs plaintes

Montréal - « La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a certes besoin de plus de ressources et de personnel car les enquêteurs sont surchargés. Mais elle doit être proactive et rapide afin d’être crédible et de fournir aux victimes de discrimination une protection efficace», déclare M. Fo Niemi, le directeur général du CRARR.

Las d’attendre, plusieurs victimes de racisme qui ont déposé des plaintes à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ), demandent à l’Assemblée nationale et aux Nations Unies d’examiner les problèmes de délai excessif dans le traitement des plaintes. 

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La plupart de ces victimes, tous membres des minorités raciales et représentés ou assistés par le CRARR, ont déposé des plaintes depuis 2003 et 2004 et attendent encore la fin de l’enquête. MM. Patrick Laincy, Alphonse Nduwimana, Cecilio Rous, Cyriaque Sumu et Winston Wood, ne savent plus quand l’enquête sur leur plainte sera terminée à la CDPDJ. Un autre plaignant, M. Olthène Tanisma, s’est vu refuser l’aide de la CDPDJ quand il a entrepris un recours en mandamus obligeant l’organisme à rendre une décision après presque quatre ans d’enquête.

Si l’enquête aboutit à une conclusion positive à leur égard, ils risquent d’attendre un an de plus pour que leur cas soit porté devant le Tribunal des droits de la personne (TDP). Bref, ça prend en moyenne 3 ans pour que la CDPDJ complète l’enquête et décide si elle peut aller au Tribunal et, 1 à 2 ans de plus pour obtenir un jugement. Selon M. Aymar Missakila, agent des plaintes du CRARR, malgré les efforts louables entrepris récemment par la CDPDJ, le problème persiste et les délais excessifs entraînent :

- une perte de la preuve essentielle et du moyen de retrouver les responsables;
- le découragement et la méfiance à l’égard de la CDPDJ chez les victimes;
- le mépris par les auteurs de la discrimination à l’égard de la CDPDJ et de lourdes conséquences financières et psychologiques pour les victimes pendant une longue durée.

En outre, les délais peuvent entraîner le rejet de la plainte par les tribunaux, car ils créént des préjudices pour les parties mises en cause. En mai 2006, le TDP a rejeté une cause portée par la CDPDJ contre le Centre de la petite enfance Les Pandamis en raison de délai injustifié dans l’enquête (la CDPDJ a pris presque 5 ans pour enquêter et mener le dossier devant le Tribunal).
Au-delà des délais, d’autres problèmes ont été répertoriés :

- des changements réguliers d’enquêteurs, certains dossiers « se baladant » d’un enquêteur à un autre;

- des gestionnaires qui promettent des réponses sur l’état des dossiers mais qui n’y donnent pas suite;

- de longues périodes d’inaction dans le dossier, sans aucune explication aux plaignants même quand ces derniers en font la demande aux chargés de dossier et

- un manque de savoir-faire chez certains enquêteurs dans la recherche de la preuve et l’analyse en matière de racisme, notamment le racisme dans l’emploi. Découragés par les délais excessifs et par le manque d’intérêt des autorités québécoises face à leur sort, ces personnes ont demandé au CRARR d’informer le Rapporteur spécial des Nations-Unies sur le racisme, M. Doudou Diène, qui a lui-même visité Montréal en septembre 2003 et qui a signalé dans son rapport le problème de délai des commissions des droits de la personne au Canada.

Pour monsieur Sumu, à qui la CDPDJ a promis un rapport d’enquête à plusieurs reprises, « Un délai de justice est un déni de justice. C’est inquiétant qu’un an après la diffusion du Rapport de Groupe de travail sur la pleine participation à la société québécoise des communautés noires, dans lequel ce problème est dénoncé, le Gouvernement ne soit pas encore passé à l’action ».

« Je veux que la Commission complète au moins son enquête avant que mon épouse, qui a 71 ans et qui est très malade, et moi, nous décédions », plaide M. Rous, 70 ans, dont la plainte a été déposée par le CRARR en août 2003.

« Quatre ans et 5 enquêteurs plus tard, j’attends toujours, affirme M. Wood, des personnes impliquées ne sont même pas retrouvables et dans le premier rapport produit en janvier 2007, on m’a identifié comme étant d’origine haïtienne ! ».

« Les délais excessifs signifient que dans plusieurs situations très évidentes de profilage racial des mineurs ou de racisme dans l’emploi, on tolère et encourage même le racisme», constate M. Tanisma, qui doit dorénavant poursuivre à ses propres frais son employeur, la Ville de Montréal, pour racisme dans la dotation.

« La Commission a certes besoin de plus de ressources et de personnel car les enquêteurs sont surchargés. Mais elle doit être proactive et rapide afin d’être crédible et de fournir aux victimes de discrimination une protection efficace », déclare M. Fo Niemi, le directeur général du CRARR.

« Les délais excessifs pourront contrevenir non seulement à la Charte canadienne des droits et libertés, ce que les tribunaux ont déjà confirmé, mais aussi aux dispositions de la Convention internationale pour l’élimination de la discrimination raciale et aux Principes de Paris régissant l’obligation du Canada de se doter d’institutions des droits de la personne efficaces et accessibles », conclut-il.

Source : Ratiba Benbouzid

Agent de communication, CRARR (514) 939-3342


* Image : http://www.psac.com/what/humanrights/unity/photos-e.shtml


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