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Une vidéo d'un goût douteux

par
Ph.D., Université de Montréal, Directeur, Tolerance.ca®
Les Têtes à claques, nouvelle « success story » du Québec, est accusé de racisme par un organisme qui était inexistant il y a à peine deux mois. Comment expliquer qu’avec toutes les campagnes de sensibilisation, dont une Semaine d’actions contre le racisme, subventionnée à coups de millions par les trois paliers de gouvernements depuis une bonne dizaine d’années, sans compter les multiples centres universitaires d’études et de recherches sur le pluralisme et l’immigration, ainsi que les nombreux organismes de lutte contre le racisme, également financés par nos gouvernements, qu’aucun groupe n’ait vu cette vidéo, aujourd’hui diffusée par le géant Bell de la télécommunication ? Pourtant, la vidéo incriminée a été visionnée plus de 3 millions de fois au moment où j’écris ces lignes, selon les chiffres de ses créateurs apparaissant sur leur site.

Comme d’habitude dans les médias francophones, rarissimes sont ceux qui osent dénoncer cette vidéo. Le rédacteur en chef du journal ICI, (édition datée 3 mai 2007) hebdomadaire qui se veut branché, également chroniqueur culturel dans je ne sais combien de talk shows (sans doute manque-t-on de chroniqueurs au Québec) admet que le choix de Kunta Kinté n’était pas le plus heureux. Qui est Kunta Kinté? Kinté représente, pour les Noirs, un esclave qui refusait sa condition et qui était représenté dans la célèbre émission Racines (Roots) d’Alex Haley, émission dont on célèbre cette année le 30e anniversaire.

« Certains prennent la chose au premier degré », nous explique M. Pierre Thibeault, le rédacteur en chef du journal branché. On aimerait bien connaître le second degré. Se moquerait-on de la même manière au Québec, au premier comme au second degré, mettons de …Lionel Groulx, maître à penser des nationalistes et autres penseurs de la nation, sans que vous ne vous méritiez une claque sur la tête ?

L’impair du créateur Michel Beaudet, poursuit Thibeault, « fut fait en toute bonne foi, sans aucune arrière-pensée ». Quant à ceux qui se plaignent, notre commentateur « ne dirait par la même chose (d’eux)… parce que réussir à entrevoir un soupçon de propos raciste dans cette capsule des Têtes à claques, voilà qui relève d’une mauvais foi crasse (sic) ou d’un désir de se faire de la pub », assène-t-il.

Mais cela n’est pas tout. Nous vivons « dans une société ouverte, multiculturelle, et je ne crois pas un seul instant, ajoute notre commentateur, que les enfants qui auront vu cette capsule deviendront soudainement des êtres emplis de préjugés à l’endroit de la communauté noire ». À quels enfants pense M. Thibeault, si ce n’est aux enfants blancs ? Comment les enfants noirs réagiraient-ils de se voir ainsi ridiculisés ? M. Thibeault se pose-t-il la question ? Et les créateurs de ce vidéo-clip, qui pourtant s’adresse aux jeunes, tiennent-ils compte justement des enfants autres que blancs et québécois pure laine ? 

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Significative également est la réaction de l’auteur du vidéoclip, M. Michel Beaudet. Lorsqu’on est célèbre, on a n’a pas de compte à rendre à qui que ce soit. Qu’un organisme se plaigne et lui fasse parvenir une mise en demeure, faut-il s’en faire ? Voici ce qu’il a déclaré, tel que rapporté dans Canoë. Il confirme avoir reçu la mise en demeure de Québec Pluriel le 18 avril, mais admet l'avoir rapidement mise de côté. « On l'a lue, on a souri et on l'a mise sur une tablette », raconte-t-il, disant trouver la démarche de Québec Pluriel complètement « ridicule ». « Il n'y a aucun propos dénigrant là-dedans. C'est une mise en scène absurde! » répète-t-il en tentant du même coup de discréditer les plaignants : « C'est une vision paranoïaque d'un petit groupe de personnes qui ne représente pas la majorité », ajoute-t-il tout en avouant s'être servi du nom Kunta Kinté sans même y réfléchir. 

Pourquoi a-t-il appelé son cannibale Kunta Kinté ? « Ça a sorti comme ça. [...] Kunta Kinté, c'était le héros de Roots, une série que j'écoutais quand j'avais sept ou huit ans », explique-t-il. 

Que penseraient la majorité des Québécois si on les dépeignait comme des bûcherons, portant ceinture fléchée et vivant dans les bois ? Peut-être devrait-on aussi créer une vidéo véhiculant tous les préjugés d’antan sur les Québécois afin de tester notre seuil de tolérance collectif ? Qu’en dites-vous ? Vous rappelez-vous d’un certain tollé provoqué par un M. Richler, associant les femmes québécoises à des truies ? Absurde, dites-vous ? Sans doute que M. Beaudet était trop jeune…

Voir la vidéo 




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Kunta Kinté ou Ramsès ?
par Pier3d le 14 mai 2007

Bonjour M. Teboul, Bienvenue au Québec ! C'est difficile, en lisant votre texte, de savoir exactement si vous êtes d'accord ou non avec l'accusation de racisme. Quant à moi je ne vois aucun racisme là-dedans, ni dans les histoires de voile (musulman), d'ailleurs, et je m'oppose chaque fois qu'on accuse les Québécois de racisme. Celui qui fait ce genre d'accusation est soit de mauvaise foi ou alors il ne sait pas ce qu'est le racisme ; le vrai, l'horrible, le dégueulasse racisme. Dans le cas qui nous occupe ici, le personnage de la femme a utilisé Kunta Kinté comme elle aurait pu dire « Aie, Dr Wilby !!! » si elle avait eu maille à partir avec un médecin ou « Aie, Ramsès !!! » si l'histoire s'était passée en Égypte. Pour un Québécois ordinaire, Kunta Kinté est un personnage de télévision comme Davy Crocket, Batman ou Indiana Jones. Si le personnage de l'historiette avait été un américain portant un chapeau de feutre et un révolver à la ceinture, la femme aurait pu dire : « Aie, Indiana Jones !!! » Prétendez-vous que ça aurait pu être offensant pour les Américains ? Laissez-moi rire. Roots est l'ancêtre des miniséries. C'est vrai que l'histoire est sérieuse mais vu d'ici, parmi les autres feuilletons américains comme Mission Impossible ou Star Trek, ce n'était que du cinéma. Je me souviens qu'à l'époque, lorsqu'il y avait un noir dans un bureau ou dans une 'shop' (atelier), ses compagnons de travail pouvaient l'appeler Kunta Kinté. J'ai plusieurs fois vu ça et jamais je n'ai senti de méchanceté ou de mépris dans ce geste. Je n'ai jamais vu non plus le noir s'en offusquer. Mon exemple avec Ramsès n'est pas parfait parce que Ramsès n'est pas un personnage de la télé. Mais imaginons que l'histoire se passe en Arabie et que la poupée Tête-à-claques lui lance : « Aie, Ali Baba !!! », croyez-vous que les Arabes s'en offusqueraient ? Si c'est le cas, c'est à eux à changer, pas à nous. Le sens de l'humour !??? Vous connaissez ??? Pierre Cloutier Longueuil
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par Victor Teboul

Victor Teboul est écrivain et le directeur fondateur de Tolerance.ca ®, le magazine en ligne sur la Tolérance, fondé en 2002 afin de promouvoir un discours critique sur la tolérance et la diversité. 

Contact :  info@tolerance.ca

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