Manquons-nous de ressources au Québec ? C’est un Patrice Roy, pâle, les traits tirés et visiblement exténué, qui a clos le débat des chefs hier soir, le 13 septembre 2018, au réseau français de la société d’État. Journaliste chevronné, il a dû animer seul un débat de plus de deux heures, alors que Radio-Canada annonçait d’entrée de jeu que 15 partenaires médias (Le Devoir, Télé-Québec, Huffington Post) s’associaient au «Grand débat».
Le réseau de Radio-Canada souffre-t-il à ce point d’un déficit budgétaire qu’il ne lui est pas possible d’inviter des journalistes, spécialistes des sujets qui ont été abordés (santé, environnement, économie, immigration) pour confronter (oui, confronter) nos politiciens ?
Notre société d’État manque-t-elle à ce point de ressources ? Idem pour TVA lors du débat du lundi 10 septembre sur l’économie : Mario Dumont, anima seul le débat avec les représentants des quatre formations.
Pour une élection dont le résultat nous liera pendant quatre ans à un nouveau gouvernement, pourquoi ai-je cette désagréable impression que nos médias francophones ont perdu la passion de l’information. et même, pourrait-on ajouter, le contact avec la réalité ? Comment la société d’État peut-elle justifier le fait qu’aucune des personnes, qui paraissaient à l’écran pour poser des questions à nos politiciens, ne provenait de l’île de Montréal, où vit 25 % de la population du Québec?
De plus, alors que les médias sociaux occupent aujourd’hui notre temps et notre espace, ils étaient absents lors de la transmission des deux débats télévisés, comme si ces derniers avaient lieu dans les années 1960, alors que les médias sociaux auraient incité à une véritable et dynamique participation des électeurs et des électrices.
Je sais, parce qu’on me l’a reproché plus d’une fois, qu’on n’aime pas que je compare nos médias francophones avec ce qui se fait chez les «Anglais». Mais les anglophones et les allophones, qui ne forment pourtant que 20 % de la population québécoise, auront droit, eux, à un débat en langue anglaise qui sera lui diffusé simultanément par les trois réseaux de télévision anglophones le 17 septembre prochain. Et qui plus est, les chefs des formations politiques affronteront trois journalistes qui participeront au débat. Que les médias francophones ne s'efforcent pas d'unir leurs ressources pour diffuser un débat qui serait transmis simultanement sur nos réseaux francophones et auquel plusieurs journalistes participeraient me laisse perplexe.
Afin que la politique intéresse tout le monde - et en particulier les nouvelles générations -, une dose de passion et d’imagination de la part de nos médias francophones pourrait s'avérer fort utile pour combattre l’indifférence et… les abstentions.
14 septembre 2018