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Dialogue interreligieux : les nouvelles approches

© Reuters*
En moins de cinquante ans, le portrait religieux du Québec s’est considérablement transformé : phénoménal déclin du catholicisme, désaffiliation religieuse prononcée, montée remarquable de communautés religieuses non chrétiennes. Les jeunes catholiques font aujourd’hui face à un pluralisme religieux bien établi. Quelles relations établissent-ils avec les croyants d’autres confessions ?

Au Québec, au moment même où le catholicisme perdait en popularité, où la laïcité et le séculier prenaient les rênes d’une société moderne - démonstration de la coupure effectuée entre l’État et l’Église lors de la Révolution tranquille - le nombre de communautés non chrétiennes augmentait visiblement.

Si, en 1921, on ne recense que 478 personnes de confession musulmane, leur nombre grimpera en flèche à partir des années 1970, huit ans après l’abolition des mesures discriminatoires qui étaient contenues dans la Loi canadienne sur l’immigration. On estime ainsi à 40 000 le nombre de musulmans au Canada en 1970, à 100 000 en 1981 et à 250 000 en 1991. Aujourd’hui, il dépasserait 600 000. Au Québec les musulmans forment la communauté non chrétienne la plus nombreuse. Il y aurait actuellement 200 000 musulmans établis sur le territoire québécois.

L’accent mis par les gouvernements québécois, depuis les années 1980, sur une immigration de langue française n’est pas étranger à cette situation; on compte parmi les immigrants francophones de nombreux musulmans provenant de l’Algérie, du Maroc, de Tunisie et du Liban.

Si le cas de l’islam est remarquable, il n’est évidemment pas le seul. Comme le démontre Frédéric Castel dans L’Annuaire du Québec 2004, le nombre d’hindous, de sikhs et de bouddhistes a également considérablement augmenté.

Cette reconfiguration du contexte social, aussi bien ethnique que religieuse, juxtaposée à une baisse draconienne du nombre de pratiquants chrétiens, pousse inévitablement ces derniers à élaborer des approches de rapprochement avec les membres des nouvelles religions du paysage québécois. C’est le cas notamment de plusieurs associations de jeunes. 

Humaniser le monde 

Le Centre étudiant Benoît-Lacroix a même officialisé cette démarche en mettant sur pied des rencontres islamo-chrétiennes. Le centre désire favoriser une compréhension entre les étudiants chrétiens et musulmans de l’Université de Montréal. Les objectifs sont fort simples : partager la foi, s’ouvrir à une foi différente de la sienne, développer un climat de paix, humaniser le monde pour s’accueillir les uns les autres avec nos différences.

Comme l’indique Patrice Brodeur, titulaire à l’Université de Montréal de la Chaire de recherche du Canada sur l’islam, le pluralisme et la mondialisation, le 11 septembre a créé un intérêt à l’égard de l’islam qui s’est traduit par un désir de compréhension dont l’élaboration de dialogues interreligieux en serait un exemple. Il ajoute néanmoins qu’une «marginalisation certaine» s’est également développée.

S’il y a de plus en plus de regroupements qui jettent les bases de tels dialogues, d’autres vivent, évidemment, différemment leurs rencontres avec les autres religions. Le Groupe étudiant d’animation biblique et pastorale de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), l’IKTUS, n’organise quant à lui aucune activité du genre.

Le besoin ne se fait pas réellement sentir, note Samuel Coulombe, un des deux employés à temps plein du groupe. Étudiant en gestion des ressources humaines, Coulombe indique «qu’il pourrait être intéressant d’établir des dialogues», mais que pour l’instant «aucune initiative n’a réellement été entreprise» en ce sens.

«Il faut comprendre que l’IKTUS se trouve à quelques mètres seulement des deux autres organisations religieuses. Donc, il y a déjà un certain dialogue interreligieux», spécifie-t-il. Ces deux organisations regroupent les musulmans et les juifs de l’UQAM.

Coulombe admet qu’il n’est pas rare que les membres de ces trois organisations étudiantes discutent ensemble: «Cette démarche n’a rien de formel, c’est vrai, mais elle nous permet néanmoins d’en connaître plus sur certains aspects propres à leurs croyances. »

Par ailleurs, l’IKTUS a su depuis sa création, il y a près de 10 ans, établir un dialogue entre les différentes confessions chrétiennes. Car, précise Coulombe, «il s’agit avant tout d’un groupe œcuménique». L’IKTUS rassemble dans un même local aussi bien des catholiques que des évangéliques, des anglicans, des protestants et des orthodoxes. Cette rencontre intra-religieuse permet «d’échanger sur nos différences. Et évidemment, cela ne se fait pas sans effort puisqu’il y a des différences que nous devons surmonter. »

Le père Beaubien, pionnier du rapprochement

La figure de proue du développement de ce type d’initiatives demeure sans contredit le père jésuite Irénée Beaubien, aujourd’hui à la retraite. Les dialogues interreligieux intégrant des catholiques ont réellement pris naissance au Québec au cours des années 50, en grande partie grâce à lui. Au départ, il s’agissait plus d’une plateforme de dialogue interconfessionnel.

Photo: Gunther Gamper**
«Tout a commencé en 1952, se rappelle M. Beaubien, lorsqu’on a organisé des rencontres très discrètes entre catholiques et protestants. » Une initiative qui nous paraît fort simple aujourd’hui, mais qui, à l’époque, était une petite révolution en soi. Notons que, jusqu’au pontificat de Jean XXIII, l’Église catholique était réticente à l’idée même d’œcuménisme, c’est-à-dire d’actions communes entre les confessions chrétiennes. Il s’agissait d’exécuter un retour à l’enseignement du Christ tel que transmis dans les Évangiles : «Jésus avait lui-même demandé l’unité de ses disciples en disant “Qu’ils soient un afin que le monde croit”», note le père Beaubien.

Les initiatives du père jésuite portèrent fruit. En 1963, le Centre canadien d’œcuménisme voyait le jour. Aujourd’hui, l’organisation regroupe plus d’une dizaine de traditions religieuses dont les Églises anglicane, baptiste, catholique, évangélique, luthérienne, mormone et orthodoxe. Le dialogue fut à ce point marquant qu’à l’occasion de l’Exposition universelle de Montréal, en 1967, les sept principales confessions chrétiennes canadiennes se rassemblèrent sous le même pavillon, le pavillon chrétien. Ce fut une période marquée par «un immense travail d’éducation afin de rapprocher les Églises», se souvient-il.

Le père Beaubien se réjouit aujourd’hui que les jeunes poursuivent le dialogue et que ce dernier a désormais dépassé le cercle restreint des Églises chrétiennes pour s’étendre à celui des grandes religions du monde : «C’est le fruit des liens que nous avons élaborés il y a plusieurs décennies. »

Lorsqu’on questionne le père Beaubien sur les raisons qui l’ont poussé à jeter les bases d’un dialogue interreligieux, il répond posément: «Mon cher, si on veut avoir la paix dans le monde, on doit se parler. Il faut réussir à aller chercher le meilleur dans toutes les croyances sinon on ne peut entretenir l’espoir d’établir une paix durable. »


Le dialogue interreligieux aujourd’hui

Mais ce besoin de se rapprocher des autres religions, comment s’explique-t-il aujourd’hui? Pour comprendre ce phénomène, il faut tout d’abord admettre que la dynamique des jeunes est maintenant foncièrement différente de celles vécues par les générations précédentes, précise le professeur Patrice Brodeur. «La plupart d’entre eux -surtout ceux qui demeurent en milieu urbain - sont à l’aise avec la diversité. Ils vivent déjà dans un milieu où coexistent plusieurs identités religieuses. »

Ce tolérantisme apparent à l’égard des différences sur le plan des croyances ferait partie intégrante de la réalité des jeunes générations, ce qui favoriserait inévitablement un certain relativisme culturel, premier pas nécessaire à une compréhension des dissemblances.

Photo: Gunther Gamper***
«Les jeunes se disent: “Si tu es gentil et que tu ne me casses pas les pieds, je ne vois pas pourquoi il y aurait un problème”», résume Patrice Brodeur. Ceux-ci détiendraient une propension prononcée pour le décloisonnement, souligne le spécialiste. Cette génération de pratiquants, qui n’a pas connu l’époque où le catholicisme était à son zénith ni la chute du pouvoir ecclésiastique, comprend d’ailleurs mal la phobie qu’entretiennent plusieurs à l’égard du phénomène religieux en général. Et ce pourrait être ce rejet qui les pousserait à tenter, à leur tour, de scruter encore plus ouvertement les autres religions afin d’assurer une meilleure compréhension de celles-ci. Prêcher par l’exemple, en quelque sorte.

Selon Brodeur, deux types de dialogues sont mis de l’avant aujourd’hui. «Il y a tout d’abord le dialogue quotidien entre des individus provenant de religions différentes. » Cette pratique, tient à préciser le spécialiste, vogue sur une certaine superficialité compte tenu du fait qu’elle ne pousse pas les intervenants à approfondir leurs différences fondamentales, exercice nécessaire à un dialogue bénéfique. «Ce n’est pas parce que des personnes se parlent qu’elles se comprennent», résume-t-il.

«L’autre type de dialogue est celui qui est officiel. Celui-là permet d’aller beaucoup plus en profondeur en raison de son encadrement et de sa préparation. » Les raisons qu’il évoque puisent à même la structure qui sert de ligne directrice aux dialogues interreligieux. «Lors de telles rencontres, on se dote d’une feuille de route sur laquelle sont inscrits les paramètres à respecter afin que tous les participants se sentent à l’aise. »

Brodeur rappelle que plusieurs critères doivent être pris en considération lorsqu’on élabore de telles initiatives afin de ne pas développer un dialogue de sourds: «On doit, entre autres, prendre en considération qu’il y a un phénomène de groupe à contrôler. Une présence majoritaire d’une religion en particulier, qui ferait la promotion d’une Vérité qui est la sienne, sans prendre en compte celle des autres, engendrerait un effet négatif. Il faut donc s’outiller afin que cela ne se produise pas. »

Ce débalancement à l’intérieur d’un groupe peut pousser la minorité à décrocher, voire à percevoir l’exercice comme un événement derrière lequel se cache un objectif de propagande ou de promotion religieuse.

L’attitude des jeunes catholiques pratiquants pourrait se diviser en trois catégories : ceux qui tolèrent, ceux qui ghettoïsent et ceux qui ont développé une quête spirituelle qui les pousse à en connaître toujours plus sur les autres.

« La tolérance n’est pas synonyme de
compréhension »

«En premier lieu, explique Brodeur, ceux qui tolèrent ne se posent pas trop de questions. Ils dénotent même une certaine méséducation. Cette situation englobe la majorité des jeunes. Deuxièmement, il y a ceux qui ghettoïsent, qui mettent des barrières entre les différences. » Brodeur reconnaît toutefois que cette tendance est «beaucoup moins marquée» à Montréal qu’aux États-Unis, car la présence de ghettos religieux serait quasi inexistante dans la métropole canadienne. Finalement, précise-t-il, il y a ceux qui, par leur quête spirituelle, tentent d’en connaître toujours davantage sur les autres religions.

Bien que la tolérance soit certainement un fait bien établi chez les jeunes, à cause de la proximité qu’ils ont avec la différence, «la tolérance n’est pas synonyme de compréhension», prévient toutefois le spécialiste. D’ailleurs, les dialogues interreligieux ne sont qu’une facette parmi d’autres d’un long travail qu’il faut établir entre les jeunes, note-t-il.

«On peut parler de dialogue interreligieux, soit les dialogues entre les grandes religions, ou de dialogues intra-religieux, soit les initiatives qui, comme l’œcuménisme, font le rapprochement des différentes factions d’une même religion, mais il faut également parler d’un dialogue qui rassemble aussi bien les croyants pratiquants que toute autre personne», ajoute-t-il.

Cette vision humaniste et universaliste, Patrice Brodeur l’a baptisée «intervision du monde : il s’agit là d’établir un dialogue, un pont, entre les diverses visions qu’on entretient à l’égard du monde et non pas uniquement entre celles qui proviennent des religions. »

D’ailleurs, souligne le spécialiste, l’incompréhension se fait davantage sentir entre les croyants et les non-croyants. Et c’est ce terrain que désire défricher Brodeur et les chercheurs de sa chaire. L’objectif déclaré : établir et rendre plus accessible un dialogue toujours plus universel.


* Le pape Jean-Paul ll en compagnie du Grand rabbin Meir Lau (à gauche) et de l'imam Tayseer al-Tamimi lors d'une rencontre interreligieuse à Jérusalem, en mars 2000.

** M. Irénée Beaubien (à gauche) en compagnie du Dr Stuart E. Brown, directeur général du Centre canadien d'oecuménisme.

*** M. Patrice Brodeur, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’islam, le pluralisme et la mondialisation de l'Université de Montréal.

Pour en savoir plus:

DAHER, Ali, Les musulmans au Québec, Centre culturel islamique de Québec (CCIQ), 2003.

LAROUCHE, Jean-Marc et MÉNARD, Guy (dir.), L’étude de la religion au Québec. Bilan et prospective, PUL, 2001.

Profils des principaux groupes religieux du Québec, Québec, ministère des Affaires internationales, de l’Immigration et des Communautés culturelles, 1995.

RENAUD, Jean, PIETRANTONIO, Linda et BOURGEAULT, Guy, Les relations ethniques en question. Ce qui a changé depuis le 11 septembre 2001, PUM, 2002.

VENNE, Michel (dir.), L’annuaire du Québec 2004, Fides, 2004.


Cet article fait partie d'une série sur la diversité des valeurs et des croyances religieuses dans les milieux collégial et universitaire réalisée grâce à la contribution financière de :






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La paix a juresalem
par Science le 27 juin 2008

 

Mesdames ,Messieurs,je croie et j'ai le sentiment que c'est la proposition equilibre pour la paix , le statue de juresalem la veille ville sainte reste

Capital religieuse important unissons toutes les religions et les livres Saint la Bible la Thorat le Coran 

pour le dialogue une Science commune les unis la creation divine

la Science ellicoidall en quelque sorte une millieme dimension

plus loin Capital admistrative juresalem

pour l'equilibre de la region cree une nouvelle voie ferry ,autoroute

 iteneraire gaza sud liban  par ferry autoroute sud liban cisjordanie

le trace le plus court l'autre possibilite cisjordanie en train ou autoroute iteneraire golan sud liban ferry sud liban gaza

l'equilibre c'est officialise Capital religieuse la veille ville juresalem

et relie gaza ,cisjordanie par cette iteneraire ferry autoroute

j'ai la conviction que c'est la paix ,equilibre et valeur

Veuillez agreer Mesdames ,Messieurs mes sincères salutations

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Capital re

 

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