Je viens de lire un livre qui m’a ému. Il s’agit du témoignage de Lise Ravary, «Pourquoi moi ?» qui vient de paraître aux éditions Libre Expression. L’auteure y raconte avec beaucoup de nuances et de sensibilité la démarche spirituelle qu’elle a entreprise il y a vingt ans pour devenir juive en suivant la procédure de conversion la plus stricte du judaïsme.
J’ai été touché par sa manière toute simple de décrire la complexité de son cheminement, lequel a duré cinq ans et était jalonné d’obstacles. Lise Ravary nous décrit son parcours de manière précise et détaillée, et d’une façon tout à fait personnelle. Son récit nous révèle une femme persévérante, sincère et amoureuse du peuple juif, de l’État d’Israël et du judaïsme. Je l’ai dit – j’ai été ému à la lecture de ce livre.
J’ai été heureux de découvrir un autre son de cloche sur les Juifs orthodoxes, que l’on dit fermés et austères. J’ai été étonné aussi de leur ouverture, étonné qu’ils aient accueilli et accepté l’auteure - une étrangère après tout - dans l’intimité de leurs foyers avec autant de spontanéité et de générosité, étonné de la chaleur et de la joie qui animent leurs foyers, une ambiance que Lise Ravary réussit si bien à nous décrire, souvent même avec humour. Ce qui contredit les perceptions habituelles sur un milieu que l’on considère à tort, semble-t-il, comme impénétrable et indifférent aux non-Juifs.
Je ne révélerai pas la fin de son récit qui permet de prendre conscience du pluralisme de la communauté juive québécoise ainsi que de la pluralité de l’identité juive, deux aspects qui sont si peu reflétés dans les médias francophones du Québec. D’ailleurs Lise Ravary, qui est également journaliste et chroniqueuse, critique aussi ses propres collègues dans son livre et ses chroniques, et adopte des positions à contre-courant des idées reçues, ce qui est tout à son honneur.
Je lui souhaite qu’elle acquière aussi une meilleure connaissance des Juifs québécois de langue française, qui oeuvrent non seulement dans le milieu du jet set – elle nomme son amie Sonia Benezra à quelques reprises ainsi qu’Aldo Bensadoun, le propriétaire des magasins Aldo –, mais aussi dans des secteurs moins en vue, et contribuent tout autant à la société québécoise, en particulier à sa littérature, à son théâtre et à son cinéma.
Pour ma part, j’ai toujours été frappé par la fascination qu’exercent les milieux juifs orthodoxes sur l’imaginaire québécois. Comme on le sait, Yves Thériault fut le premier écrivain à leur consacrer une œuvre avec son roman Aaron, paru dans les années 1950. Plus tard, dans les années 1990, Francine Noël publia Babel, prise deux et, plus récemment, Hadassa de Myriam Beaudoin fut couronné de succès.
Voir sur ce sujet : Québec : présence juive et représentations romanesques ainsi que mon entrevue avec Myriam Beaudoin : Hadassa ou Alice au pays des Hassidim.
En août dernier, un mémoire de maîtrise déposé à l’Université de Montréal se penche, lui, sur des figures féminines juives dans des œuvres québécoises récentes. Voir : Mythe et images du Juif au Québec au centre d’une nouvelle étude.
Également frappant est le fait que de nombreux livres se publient régulièrement au Québec sur les Juifs québécois, que ces ouvrages sont écrits pour la plupart par des auteurs qui ne sont pas juifs et ce tandis que la grande majorité des Juifs du Québec s’identifient peu ou, disons-le, ne s’identifient pas du tout à la culture québécoise. Mais cela est évidemment une autre histoire…
Article mis en ligne le 17 mars 2013 et mis à jour le 20 mars 2013.