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Hommage à Mahsa Amini, battue à mort en Iran pour ne pas avoir porté le hijab correctement

Bande de malfaiteurs, ils ne se sont pas contentés de voiler le corps et d’interdire la rencontre entre le toucher et les cheveux. Ils ont verrouillé la pensée et détruit l’éthique de la différence. D’autant plus qu’ils ont délibérément laissé l’uniformité sombrer dans le noir.

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Une main d’une belle fille qui refuse que son corps soit réduit au texte s’approche de mon visage. Contrairement à ce que je pensais, la main que j’attendais me couvrir de tendresse, me gifle en criant : vous ne servez à rien. Vous. Suis-je l’illustration d’une culture que l’inconscient a forgée malgré le discours que je tiens en signe d’une rébellion qui manque d’audace ? Cette gifle, n’est-elle pas le symbole d’une pseudo radicalité qui cautionne la verticalité de Un en camouflant l’origine du mal ? Ils sont tous, filles et garçons, prêts à sacrifier le corps au détriment du voile. La gifle renvoie au refus de la mêmeté, pour paraphraser Ricœur et une dénonciation de l’uniformité à laquelle la chair doit se soumettre au nom de la culture.

Bande de malfaiteurs, ils ne se sont pas contentés de voiler le corps et d’interdire la rencontre entre le toucher et les cheveux. Ils ont verrouillé la pensée et détruit l’éthique de la différence. D’autant plus qu’ils ont délibérément laissé l’uniformité sombrer dans le noir.

Que vous le vouliez ou non, tout ne tourne-t-il pas autour de la liberté ?

Le danger de la doxa réside dans son entêtement à survivre sur le dos d’une opinion qui se dévoile sans aller jusqu’au bout du raisonnement. Satara, Akhfa, en arabe veut dire cacher. Star rassaq, couvre ta tête, couvre tes cheveux.

Il s’agit là d’une grave atteinte, non seulement à la liberté selon laquelle le corps est perçu comme autrui que le sujet fustige en permanence, mais également une guerre contre la problématisation du concept de corps en vue de construire un nouveau modèle de ce corps, naturel et culturel à la fois, pour reprendre Michela Marzano.

Voiler rime avec cacher, satara. Cache tes cheveux de crainte que tu fasses l’objet de séduction. Quelle représentation misogyne ! Vous vous êtes permis de cultiver le corps de la femme au nom d’une verticalité sous prétexte que le texte libère vos désirs sexuels et régule le transfert du fantasme et le convertit en orgasme. Ils veulent priver les cheveux de leur langage. Ils veulent coûte que coûte tuer la notion du corps que représentent les cheveux au nom de je ne sais quelle pudeur. Satara, cacher s’accorde avec porter atteinte à des expressions romantiques qui fortifient le verbe aimer. Toutefois, le voile étrangle la tendresse que les cheveux appellent et les privent des couleurs pour que les carasses ne soient complices du regard.

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Tout ce monde qui enjolive la communication entre les êtres humains est combattu par des détenteurs du contraste au nom d’une soi-disant normalité morbide. Du coup, ce corps culturel qui veut retrouver sa nature en exprimant son refus de sa domestication, se retrouve face au feu. Seul le feu s’harmonise avec ce corps qui retrouve à son tour son amour de la vie que les soi-disant gardiens du temple veulent trépigner. La danse autour du feu de la jeune fille dévoilée, sans foulard, les cheveux emportés par la joie de vivre, exprime une soif de liberté de vivre son devenir loin de cette odeur que dégage l’uniformité conjuguée au noir. Seul le feu peut anéantir une servitude que le dogme a imposée depuis longtemps. Il n’y a que le feu qui peut communiquer une rébellion de la chevelure qui désire libérer sa corporéité. Nous n’avons rien à cacher. Notre chevelure est notre vérité et notre identité. Voilà ce que nous sommes. Nous ne nous voulons pas que l’Un nous impose une autre identité que la différence et que nous devons cultiver tout en nous ouvrant sur autrui, sur le changement et sur le monde que le dogme voudrait cacher. Nous confions la tâche de bannir le voile, avec tout ce qu’il comporte comme symboles, au feu. En regardant le feu consumer ce voile noir, j’ai l’impression qu’on assiste à une nouvelle naissance du monde. La chevelure fait appel à Héraclite, un rêveur de feu, pour reprendre Sonia Béduneau. Le feu est le cosmos. De plus, ce feu est "toujours vivant". La vie est la valeur suprême pour Héraclite et ce fragment fait largement apparaître le rôle du feu : un principe de vie éternelle pour le monde. C'est donc le feu qui anime, c'est lui qui donne la vie. Le feu est le grand souverain car : "La foudre gouverne tout". Sonia Béduneau. Ces jeunes iraniennes et iraniens veulent que leur monde soit éclairé par la lumière du feu en quête d’un jour ensoleillé.

23 septembre 2022

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La Chronique d'Abdelmajid Baroudi
par Abdelmajid BAROUDI

M. Baroudi est un collaborateur régulier de Tolerance.ca. Il réside au Maroc.

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