Le Parlement canadien a cédé aux pressions du parti sécessionniste, Bloc Québécois, qui siège à la Chambre des communes du Canada, et a adopté unanimement, le 29 septembre 2010, une motion condamnant le magazine Maclean’s qui a osé critiquer le Québec.
La motion a dû être présentée à deux reprises ayant d’abord été rejetée par le député indépendant de Portneuf-Jacques-Cartier, André Arthur, qui a quitté la Chambre lorsqu’elle a été déposée une première fois.
Le libellé de la motion a été rédigé par le Bloc Québécois avec l’aide du Nouveau parti démocratique, qui est représenté au Québec par un seul député.
Cette collusion suscite bien des questions sur l’opportunisme électoraliste des partis politiques qui siègent au parlement canadien. Car les quelques centaines de députés unilingues anglophones, qui représentent des circonscriptions aussi éloignées du Québec que la Saskatchewan ou l’Alberta, ont-ils vraiment compris le fond de cette controverse provoquée par le syndrome du minoritaire qui caractérise les élites québécoises ?
Je salue ici le député André Arthur qui, lors du vote, a quitté la Chambre en affirmant que cette motion représentait un acte de «censure» de la part des parlementaires. «Je pense qu’un parlement n’a pas d’affaires à faire la critique du travail des journalistes. Il n’y a pas de plus grande autorité au Canada que le Parlement, alors avant de faire de la censure, je pense qu’on devrait réfléchir à deux fois», a-t-il indiqué aux médias.
M. Arthur, qui abonde dans le même sens que l’article du magazine Maclean’s, aurait souhaité que les médias du Québec en fassent autant. «Moi, ce que je dénonce, c’est le fait que ce soit un média anglophone qui ait été obligé de le faire, parce que les journaux et les médias du Québec étaient trop peureux pour le faire», a-t-il précisé.
Je salue également M. André Pratt, éditorialiste en chef de La Presse, un des rares journalistes à avoir critiqué «l’immaturité» des réactions. Dans l’édition du 30 septembre 2010 du quotidien (1), il déplore la réaction émotive de la classe politique et ajoute que cela montre bien à quel point nous sommes devenus hypersensibles face à toute critique provenant de l’extérieur (tiens, tiens, tiens, M. Pratt lirait-il mon Bloc-notes ?)
Pratt, en outre, cite un sondage de Cyberpresse qui révèle que, contrairement à la condamnation unanime des politiciens québécois (et on devrait maintenant ajouter canadiens), 50 % des Québécois interrogés seraient d’accord avec l’article du Maclean’s.
Enfin, le columnist du Globe and Mail, Norman Spector, qualifie de «honteux» le comportement des parlementaires canadiens.
Une autre affaire Michaud ?
Je rappellerai, pour mémoire, qu’il y a près de dix ans, j’avais dénoncé dans les journaux une autre motion unanime, adoptée, cette fois, par l’Assemblée nationale du Québec, dans laquelle on condamnait un membre du Parti québécois, M. Yves Michaud, qui avait été faussement accusé de propager de la haine contre les Juifs. C’est parce qu’on avait galvaudé le mot même de tolérance, dans la campagne qui visait à salir la réputation de M. Michaud, que j’ai fondé Tolerance.ca Mon article. publié dans Le Devoir, le 6 janvier 2001, s’intitulait «La tolérance et ce qu’elle implique».
J’aimerais rappeler aussi que M. Bernard Landry, vice-premier ministre du Québec lors de ce vote mémorable, a plus tard regretté l’adoption de cette motion déclarant que, ce jour-là, les circonstances avaient «desservi» tout le monde, puisque «c'est en toute bonne foi et en voulant justement prendre ses distances par rapport à une forme d'intolérance présumée que l'Assemblée elle-même a fait un geste qui n'était pas exemplaire au chapitre du respect d'autrui.» (Le Devoir, le 26 février 2005)
Ne dit-on pas, si bien, que plus ça change, plus c’est pareil ?
***
La fameuse motion du parlement fédéral canadien se lit comme suit :
Du consentement unanime, il est résolu, — Que cette Chambre, tout en reconnaissant l'importance des débats vigoureux sur des sujets d'intérêt public, est profondément attristée par les préjugés véhiculés et les stéréotypes employés par le magazine Maclean's pour dénigrer la nation québecoise, son histoire et ses institutions.
Pour lire la motion sur le site du parlement canadien, cliquez ici :
Note
(1). L'article de M. Pratt est reproduit intégralement dans le Maclean's http://www2.macleans.ca/2010/09/30/enough-immaturity
1er octobre 2010