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Les Bahaïs : une minorité opprimée au Moyen-Orient

(French version only)
By
president, Middle East Pact (MEP)
La foi bahaïe est née d'une scission au sein de l'islam chiite iranien au milieu du XIXème siècle avant de se répandre et d'être reconnue par les instances internationales comme une religion à part entière.

Le nombre des adeptes du bahaïsme, présent dans 178 pays, s’élève à près de 6 millions – soit un peu moins de 0,1% de la population mondiale –, dont 50% se trouvent en Asie, principalement en Inde où vit près d’un million et demi de fidèles.

Au Moyen-Orient, ils se concentrent principalement en Iran et en Egypte où ils comptent respectivement environ 350 000 et 55 000 adeptes. Ces deux dernières communautés sont sérieusement menacées aussi bien par les groupes islamistes que par les régimes en place dans les deux pays.

Une religion post-islamique

Baha'ullah (1817-1892), fondateur de la foi bahaïe, est pour les bahaïs le dernier des prophètes dans une lignée où s'inscrivent Abraham, Moïse, Jésus et Mahomet, mais aussi Bouddha, Krishna et Zoroastre. Il est enterré à Saint-Jean d'Acre, en Israël. Cela représente pour les Bahaïs une triple problématique dans leurs rapports avec l'islam officiel pour les raisons suivantes :

Premièrement, la foi bahaïe contredit l'islam en ce que Mahomet n'y est ni "le dernier", ni "le plus grand" des prophètes comme il est écrit dans le Coran. Elle contredit en particulier le chiisme, qui attend l’avènement du 12ème imam, l'imam zaman (imam caché) ou le Mahdi, vu que ce personnage messianique ne serait autre que Baha'ullah.

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Deuxièmement, la reconnaissance par le bahaïsme de religions dites non révélées – comme les grandes religions asiatiques – lui fait perdre son caractère monothéiste aux yeux des musulmans, qualité indispensable pour qu'une religion soit tolérée en terre d'islam. Ainsi, les Bahaïs ne peuvent disposer du statut de dhimmis – citoyens de seconde zone certes, mais dont la présence peut être tolérée sous certaines conditions – dont bénéficient théoriquement les juifs et les chrétiens.

Troisièmement, la présence à Haïfa et à Saint-Jean d'Acre du personnel administratif bahaï (près de 600 personnes) ainsi que des principaux lieux saints de la foi bahaïe, où les représentants bahaïs entretiennent d'excellentes relations avec les autorités israéliennes, est très mal vue par les instances représentatives de l'islam. Les Bahaïs sont régulièrement accusés d'être des agents du «sionisme mondial» et des conspirations impérialistes.

Des «sans droits» en Iran

Les Bahaïs ont été durement combattus en Iran dès l'avènement du régime islamique en 1979 et sont désormais considérés comme des «infidèles non protégés», «des non personnes qui n’ont ni droits, ni protection», comme l’indique la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) dans son rapport de 2003 sur les discriminations religieuses en Iran. Ils n’ont pas le droit de percevoir de retraite, d’inscrire un nom sur la tombe de leurs défunts, d’hériter, de se réunir pour pratiquer leur culte. Leurs lieux de culte et leurs cimetières sont régulièrement détruits et les biens de nombreux bahaïs ont été confisqués par le régime islamique. Des pressions sont exercées sur les employeurs pour licencier les salariés soupçonnés d’être bahaïs.

Aux yeux des islamistes, les bahaïs sont particulièrement menaçants en ce qu’ils constituent la seule minorité religieuse à provenir du cœur de l’islam. Contrairement au judaïsme et au christianisme apparus bien avant l’avènement de Mahomet, le bahaïsme est né d’une scission de révoltés au sein de l’islam. Si la foi druze (présente en Syrie, au Liban, en Israël et en Jordanie) est, elle aussi, issue de l’hétérodoxie chiite, elle ne connaît pas de prosélytisme : on naît druze, on ne le devient pas. En revanche, le bahaïsme est une foi prosélyte par définition puisqu’en œuvrant activement au rapprochement entre les peuples et les religions, elle se considère comme l’aboutissement ultime de la civilisation monothéiste, mais aussi des spiritualités asiatiques qu’elle annexe en s’inscrivant dans la continuité des enseignements de Bouddha, Krishna et Zoroastre.

Des «sans papiers» en Egypte

En Egypte, les quelques 55 000 bahaïs qui y sont implantés depuis plus d'un siècle et demi, sont sévèrement réprimés depuis la chute de la monarchie en 1952. Le régime de Nasser (1954-1970) les a déchus de leurs droits civiques avant de mener une campagne de discrimination les excluant de l’espace public, ce qui est régulièrement dénoncé par la communauté internationale. Le 28 novembre 2002, le Comité des droits de l’homme des Nations unies regrettait l’interdiction de culte imposée à la communauté bahaïe en Egypte et appelait les autorités égyptiennes à reconsidérer leur « position déplorable » vis-à-vis de la communauté bahaïe.

Le 9 avril 2003, la Commission des droits de l’homme des Nations unies, a déploré le fait que les membres de la communauté soient surveillés par la police égyptienne, soumis à des perquisitions et privés de leurs droits civiques, même dans le domaine privé. En dépit de l’article 46 de la Constitution égyptienne qui garantit la liberté de conviction et de culte, la pratique par les bahaïs de leur foi est jugée « hors la loi ». Comme l’a aussi noté récemment le Rapporteur spécial sur le droit à la liberté d’opinion et d’expression des Nations unies, les bahaïs sont régulièrement dénoncés comme apostats. Etant obligés de remplir la case "religion" des papiers officiels (cela va des cartes d'identités jusqu'aux contrats de logement), et en l'absence de reconnaissance de l'Etat de leur religion, les Bahaïs sont obligés de se déclarer comme musulmans. Ceux qui refusent de se soumettre à la loi sont des "sans papiers".

Les Bahaïs, soutenus par un large secteur de l'intelligentsia laïque égyptienne, composés aussi bien de musulmans que de chrétiens, demandent que rien ne soit mentionné dans la case "religion" de leurs papiers d'identités, comme solution provisoire. A terme, l'Etat égyptien devrait reconnaître la foi bahaïe, à moins que ne soit supprimée de l'état civil la mention de la religion.


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