SHARELIFE (Survey of Health, Ageing, and Retirement in Europe), est une enquête européenne sur la santé, le vieillissement et la retraite. Des séniors de 50 ans et plus ont été interrogés sur leur histoire de vie depuis l’enfance à nos jours. Le but de cette étude était de recueillir des informations sur leur santé et sur leur situation économique tout au long de leur vie pour mieux comprendre l’influence de l'État-Providence sur les conditions de vie des aînés Européens.
SHARE est une infrastructure de recherche regroupant plusieurs universités et équipes de recherche d’Europe. Elle est coordonnée par le Mannheim Research Institute for the Economics of Aging (MEA), centre de recherche en économie du vieillissement basé en Allemagne. L’enquête SHARE, avait débuté en 2004 et a donne lieu dans son troisième volet de recherche, aux premiers résultats sur les histoires de vie des aînés. Onze pays de différentes régions d’Europe, ont fourni des données à l'étude (Le Danemark, la Suède, la France, l’Espagne, l’Italie, la Suisse, l’Autriche, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas et la Grèce). D'autres données ont été recueillies en Israël. Deux «nouveaux» États membres - la République tchèque et la Pologne - ainsi que l'Irlande a rejoint l'action en 2006 et a participé à la deuxième vague de collecte de données en 2006-07.
Plus de 45000 individus de 50 ans et plus ont été interrogés dans 15 pays européens. Les données collectées incluent des variables de santé telles que l'auto-évaluation de la santé, les conditions de santé, le fonctionnement physique et cognitif, des variables psychologiques (santé psychologique, bien-être, satisfaction de vivre), des variables économiques (activité de travail actuel, caractéristiques de l'emploi, possibilités de travailler après l'âge de la retraite, sources et composition du revenu actuel, ressources et consommation, logement, éducation), et des variables de soutien social (aide au sein des familles, activités de bénévolat et transferts de revenus). Les données sont disponibles à la communauté scientifique entière gratuitement. Pour plus de détails, vous pouvez télécharger la brochure SHARE (download the SHARE brochure).
L'État-Providence est fondé sur la solidarité et la recherche de la justice sociale en prenant en charge différents risques sociaux comme la maladie, la dépendance, la vieillesse, la famille et l'emploi. Après la grande crise des années 193o, l'État-Providence, sous le nom de "Welfare State", s'était développé, en Grande Bretagne, aux États-Unis et dans les pays scandinaves. Le seul but était d'éviter l'implosion du capitalisme, par l'instauration d'un système pour aider les plus pauvres. L’augmentation des revenus des plus démunis s’était traduite par une augmentation de la consommation, engendrant de la croissance et un progrès social. À cause du niveau élevé des prélèvements obligatoires qu'il impliquait, le principe de l'État-Providence a été remis en question au début des années 1980, notamment par Margaret Thatcher en Grande-Bretagne et Ronald Reagan aux États-Unis. De nos jours, les États croulent sous d’énormes dettes et remettent en cause le budget du système de santé qui augmente avec l’âge dans nos sociétés vieillissantes. Aujourd’hui on vit plus âgé ; c’est un fait. Mais les années ainsi gagnées sont-elles des années en bonne santé ou en mauvaise santé ? Sont-elles des années qui coûtent plus ? Dans les projections, il faut tenir compte des incapacités associées à l’allongement de l’espérance de vie. Plusieurs scénarios sont décrits dans la littérature. L’hypothèse que le nombre d’années en mauvaise santé en fin de vie restera stable quelle que soit l’espérance de vie. Selon cette hypothèse, il y a un « équilibre dynamique : la période d’incapacité restera stable et par conséquent son coût aussi ». Selon d’autres, « l’espérance de vie ne pourra s’allonger indéfiniment et d’autre part, les progrès de la médecine, et la prévention permettront une apparition plus tardive des problèmes de santé. La période en mauvaise santé sera plus courte et donc moins coûteuse ». Il est vrai que les dépenses de santé sont en constante augmentation. Mais tout ne s’explique pas par le vieillissement de la population! Il y a bien d’autres facteurs à mettre en cause.
Selon les dernières statistiques d’Eurostat, le nombre des personnes âgées de plus de 65 ans devrait passer de 16 % en 2010 à 29 % en 2060. Ce phénomène qui touche également le Canada est un défi majeur pour l’ensemble des pays occidentaux, en raison de son impact sur les systèmes de protection sociale.
Les premiers résultats de SHARELIFE indiquent que les politiques de protections sociales peuvent interagir de façon positive sur le niveau d’éducation, le statut socio-économique et les conditions de vie à un âge avancé. D’après les résultats de cette étude, « l’état de santé dans l’enfance détermine le niveau d’éducation (les enfants en bonne santé sont plus diplômés) et le statut socio-économique (plus élevé) ». Les résultats confirment également l’effet sur la santé des conditions de travail sur le long terme. « Les personnes ayant connu de mauvaises conditions de travail pendant une période relativement longue ont plus de risques de déclarer un mauvais état de santé lors de leur retraite et après ». Le « choix de portefeuille » ou développement de la gestion individuelle de l’épargne permet aux aînés d’être plus responsables de leur sécurité financière après la retraite.
Cette recherche donne également des informations sur les conséquences des licenciements des individus ou de restructuration d’entreprises au cours de leur vie et qui apparaissent en moins bonne santé que les autres actifs dès l’âge de 50 ans. Selon SHARE, « On observe des effets à la fois sur la santé perçue, la santé mentale (risques de dépression) et la santé physique (maladies chroniques, particulièrement». SHARELIFE décrit les expériences traumatisantes des Européens ayant survécu aux douloureux évènements du XXe siècle. Des personnes ont subi des persécutions lors des différentes guerres ayant eu des conséquences négatives sur leur santé et leur carrière. Il en découle une responsabilité des décideurs politiques pour le soutien des personnes souffrant encore des conséquences de l’histoire qui continue également aujourd’hui d’enregistrer bien des dépassements et bien des persécutions.
Plus un pays compte de médecins, plus de soins préventifs y sont effectués. La prévention permet de faire des économies non négligeables sur le coût de santé. Plus une personne est éduquée, plus elle est susceptible d’avoir recours à des services de prévention santé. Ainsi, la politique de santé publique préventive reste à améliorer non seulement en Europe mais également au Canada.
L’étude SHARELIFE, confirme bien l'importance de la protection sociale qui se justifie autant par un impératif de solidarité que par la nécessité de garantir la cohésion sociale. Quel choix de société faut-il maintenir ? Faut-il maintenir le système actuel ? Faut-il le réformer ou le supprimer?
Les premiers résultats issus de l’enquête SHARELIFE « suggèrent deux conclusions : d’une part que les systèmes de protection sociale issus de l’État providence ont apporté des bénéfices importants et méritent d’être maintenus afin que les générations futures puissent en bénéficier. D’autre part, que le choc démographique du vieillissement qui renforce les préoccupations de soutenabilité économique de la protection sociale doit conduire à modifier ses modalités d’intervention pour les rendre plus efficientes tout au long de la vie ».
23 Novembre 2011
Pour plus d’information sur la méthodologie, les questionnaires utilisés et la synthèse des premiers résultats de SHARELIFE, se reporter aux sites :
http://www.share-project.org/t3/share/index.php?id=98
http://www.irdes.fr/Publications/2011/Qes168.pdf